Je participe à la vie d’un groupe facebook, Haïku du jour, qui est pour moi l’occasion de lire, d’apprendre, de participer et d’offrir.
horizon pentu
le chat roux rêve qu'il roule
le chat blanc qu'il neige
Le haïsha, forme de haïku, repose sur une image qu’on ne décrit pas mais qui fait naître un sentiment qui composera le corps du haïku, c’est comme une lecture intime qui étend l’image dans une dimension moins prosaïque qu’elle.
L’image ci-dessus ne me parlait que sous l’angle de son centrage forçant le regard et par son horizon penché (moi aussi, j’ai du mal à la prise de vue de voir les verticales… verticales et les horizontales… et nombreuses sont les photos que je présente qui ne sont pas redressées (pour les bawis, je m’affiche les niveaux). Les ombres longues, la lumière dorée, ce pin esseulé qui me crevait les yeux, sa forme trahissant le vent, tout cela était troublé par l’horizon glissant vers la droite.
Il se trouve que le photographe, haïjin émérite, à apprécié ma proposition en en soulevant les défauts protocollaires, comme moi finalement j’avais insisté sur un problème de prise de vue…
Je
n’ai pas mal pris le commentaire mais j’ai voulu joué le jeu :
accepter et creuser le commentaire ciblant mes 17 syllabes
Pour moi, la question n'est pas là, je suis désolé... : Vous sentez-vous bercé entre les deux chats ?
Dans une forme poétique, quelque soit l'étiquette qu'on lui prêtre, c'est l'effet que ça fait qui compte.
En fait je respecte les règles que vous citez car hormis leur nombre, les verbes rêver, rouler et neiger cohabitent dans l'image active qu'ils créent : comment pourraient-ils se faire du tort ?
Si vous voulez je veux bien « expliquer », c’est-à-dire ouvrir, décortiquer mon poème pour montrer que ces verbes sont au cœur de l’image, d’une image vivante.
Donc, l'"horizon pentu" entame le poème avec une "source de réflexion"... L’allitération en R du second vers rajoute du roulis à l'image en élargissant "l'espace d'interprétation" qui se conclut dans la douceur onirique du 3e vers. Celui-ci fait appel à l'action du chat sans insister comme a pu le faire le R précédemment. Le chat blanc glisse, c'est non écrit mais suggéré par la neige qu'on voit tomber (ce qui en outre place une saison dans le haïku).
Elle commençait à devenir longue… cette exégèse, elle s’abreuvait encore avec le texte ci-dessous !
Voilà, j’avoue tout ci-dessous
De
guiche :
— Portez-les-lui.
Cyrano,
tenté et un peu charmé :
— Vraiment…
De
guiche :
— Il
est des plus experts.
Il vous corrigera seulement quelques vers…
Cyrano,
dont le visage s’est immédiatement rembruni :
&mdash Impossible,
Monsieur ; mon sang se coagule
En pensant qu’on y peut
changer une virgule.
De
guiche :
&mdash Mais
quand un vers lui plaît, en revanche, mon cher,
Il le paye très
cher.
Cyrano :
— Il
le paye moins cher
Que moi, lorsque j’ai fait un vers, et que
je l’aime,
Je me le paye, en me le chantant à moi-même !
C’est peut-être prétentieux, ou fier, comme va le suggérer De Guiche juste après et Cyrano l’accepter juste après, mais c’est ainsi, je suis entier ! Je suis un peu…, comment dire, " emmerdeur " car lorsque je fais un vers et qu’il me satisfait… comme Cyrano, je me le chante à moi-même. J'ai longuement hésité à décarcasser mon poème en tant qu'auteur puisque j'ai entendu ces vers et j'ai trouvé leur composition honnête vis à vis du groupe. Finalement après analyse de texte tout se tient, à mon point de vue.
Il est aussi bon, je pense, de dire qu'outre le fait que je sois un homme d'action, j'ai du mal avec la contrainte des règles plus ou moins arbitraires qui pour moi tuent le vivant. Le verbe « devoir », par exemple, doit (!…) avoir de bonnes raisons s’il veut résonner juste à mes oreilles car il m’impose toujours d’observer en finesse l’objet sur lequel il porte là où « falloir » au conditionnel serait plus chaleureux et donc agréable. Devoir est trop sec, trop incisif, trop criard (pour moi…), insuffisamment pédagogique.
Cher Monsieur le modérateur je vous remercie pour votre commentaire constructif et riche agrémenté d'une main tendue
Finissons avec Schiller dans Les brigands :
"Quoi ! emprisonner mon corps dans un corset et soumettre ma volonté à l'étreinte de la loi ? Jamais ! La loi ? Elle réduit à la lenteur de la limace l'essor de l'aigle ! La loi ? A-t-elle jamais fait un grand homme ? La vraie mère des colosses et des prodiges, c'est la liberté !"
Après tout cela, j’ai décidé que j’en faisais trop contre ce modérateur qui prend à cœur d’aider les haïjins débutant dans leur désir de perfection.
J'ai pris cette liberté dont parle Schiller en supprimant ma réponse public, et en répondant un peu laconiquement je l’avoue en affichant une certaine courtoisie reconnaissante.
Je l’ai prise cette liberté aussi en travaillant à peine l’image de départ. Voici ma suggestion ci-dessous où l’arbre seul et méditatif semble admirer la mer le front auréolé et le cœur à nu :
Regardant la mer
Et jaugeant le grand espace,
L'Arbre enraciné.
Ça colle trop à l'image... mais dans le dernier vers amenant l'arbre en conclusion, on peut sentir un certain désespoir.
On peut aussi le voir fuir un jour passé de colère, voir les tons dorés créant l’espoir de projets ou rêves à venir, etc.. autant de choses que je n'arrivais pas à voir dans l'image d'origine.